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Au verso : Profil de bretonne, 9 x 6,5 cm
Élisa Marie Stéphanie Adrienne Sonrel, dite Élisabeth Sonrel, naît dans un milieu d’amateurs, qu’il s’agisse de son père, docteur en médecine et artiste à ses heures, ou de son oncle, magistrat et aquarelliste. Cependant Élisabeth Sonrel est décidée à faire de l’art sa profession et part se former à Paris à l’académie Julian vers 17 ans, à une époque où les femmes étaient encore exclues de l’École des beaux-arts. Au tout début de sa carrière, Sonrel produit surtout des aquarelles, qu’elle expose dès 1893 au Salon des artistes fran- çais, et des illustrations sur des thèmes principalement religieux, notamment pour des missels. Sa production s’oriente davantage vers la peinture et se confronte à des formats plus importants au tournant de 1900, bien qu’elle continue de pratiquer l’aquarelle, technique dans laquelle elle excelle et qu’elle n’abandonnera jamais. La figure féminine, la figure mariale comme l’idéal féminin du roman courtois, est au cœur de son œuvre, à la croisée du symbolisme et du préraphaélisme, mais un pan important de son œuvre s’attache également à saisir sur le vif des images du quotidien1.
À partir des années 1910, Sonrel fréquente chaque été la Bretagne, l’île de Bréhat, Le Faouët et toute la côte sud, de Plougastel à Concarneau en passant par Pont-l’Abbé et Loctudy, jusqu’au Croisic2. Elle y étudie et prend pour modèle des jeunes femmes et des enfants héritiers des traditions locales, témoins également d’une certaine réalité sociale3, à une époque où la Bretagne et son folklore attirent plus d’un artiste – et ce depuis le milieu du XIXe siècle. L’aquarelle que nous présentons se démarque des œuvres bretonnes empreintes de spiritualité, voire de religiosité, que Sonrel a surtout réalisées lors de ses premiers séjours. Très spontanée, presque photographique, la composition montre au contraire l’élan de petits vacanciers jouant au large, et dévoile un autre visage de la Bretagne qui est celle des cités balnéaires et de la modernité qui vient investir ses plages les mois d’été. Sonrel maîtrise tous les effets de l’aquarelle et parvient à exprimer comme une impression atmosphérique, une certaine sensation de l’air et de la lumière. Cette œuvre pourrait dater des années 1930, alors que Sonrel fait construire une villa à La Baule.
Marianne Paunet
1. De façon générale, pour toute documentation sur la vie et l’œuvre d'Élisabeth Sonrel, nous renvoyons au travail universitaire et à l’article de Charlotte Foucher : La Vierge, la dame, la muse : une approche des représentations du féminin dans le Symbolisme d’Élisabeth Sonrel (1874-1953), mémoire de Master 2 en histoire de l’art, soutenu à l’Université François Rabelais de Tours en 2008, sous la direction de Pascal Rousseau ; Charlotte Foucher, « Élisabeth Sonrel (1874-1953): une artiste symboliste oubliée », Bulletin des Amis de Sceaux, n° 25, 2009, p. 1-27.
2. En témoigne un ensemble d’aquarelles localisées au Croisic et datées de 1928 et 1932 (marché de l’art parisien).
3. Voir à ce sujet : Femmes artistes en Bretagne, 1850- 1950, cat. exp., Marie-Paule Piriou, Jean-Marc Michaud, Denise Delouche (dir.), musée du Faouët, 29 juin- 13 octobre 2013, Le Faouët, Liv’Éditions, 2013, p. 40, 96, 98-99 et 105.