Ce fils d’une famille pieuse, ayant très tôt contracté le goût de l’étude et reçu une solide instruction, est huit années durant l’élève de Révoil à l’École des beaux-arts de Lyon, de 1809 à 1817. Après avoir épuisé toutes les ressources de cet enseignement et conscient des limites de son talent au regard de son ambition, il intègre l’atelier de Guérin à Paris, peintre en faveur auprès du nouveau régime et jouissant d’un nouveau prestige depuis le succès de Didon et de Clytemnestre au dernier Salon. Dans cet atelier partagé entre l’enseignement exigeant du maître et la tentation de l’excès introduite par les audaces de Géricault, Orsel s’impose par sa singularité. Discret et laborieux, il cultive un système à l’opposé du romantisme pictural naissant, cherchant à épurer son style par l’étude des grands maîtres de l’âge classique (Lesueur, Poussin, Dominiquin), mais aussi par celle, plus originale, des primitifs toscans, avec lesquels Révoil l’avait familiarisé. Guérin s’attache particulièrement à cet élève instruit, de bonnes mœurs et cherchant obstinément à se perfectionner. Ce dernier préfère d’ailleurs suivre son maître à Rome lorsqu’il est nommé à la tête de l’Académie de France, en 1822, plutôt que de concourir pour le prix de l’École des beaux-arts.

 

Au programme de ce séjour qui durera jusqu’en 1831 figure l’exécution d’une commande de la ville de Lyon, sans doute attribuée à cet enfant du pays pour lui permettre de financer ses études romaines. Emprunté à l’Antiquité biblique, le sujet de Moïse présenté à Pharaon par Thermuthis (ill. 1) lui a sans doute été inspiré par l’Orient ancien imaginé par Guérin dans Didon et Énée, l’un des plus grand succès de la Restauration dans le genre de la peinture d’histoire. La découverte de l’Italie, l’étude des maîtres anciens et l’exécution de tableaux de moindre importance, ralentissent la maturation de ce grand projet composé depuis 1821. Mis en chantier en 1826, suspendu par des voyages à Pise et à Paris en 1828, le tableau n’est achevé que pour l’exposition du Capitole à Rome au printemps 1830 (1).

 

 

Malgré l’intérêt croissant de l’artiste pour l’art du Quattrocento et pour l’esthétique de ses contemporains et amis nazaréens, Moïse présenté à Pharaon est modelé sur le canon guérinien : la sagesse de la pantomime, la palette brillante et la limpidité de l’atmosphère dérivent de l’exemple de Didon. Peinte d’après nature, notre Tête de jeune femme trahit par ailleurs la méthode d’idéalisation apprise de son maître. Après une opération consistant à épurer le contour et à unifier le modelé, cette tête de jeune Italienne peinte avec légèreté deviendra celle de Thermuthis. Cette conversion a cependant créé un désaccord entre le type et la race du personnage : « il est impossible de se figurer que cette femme, d’un type complétement européen, porte un habillement fait pour elle » selon Lenormant (2). Et si Gustave Planche, critique hostile à l’« école classique », juge sans faire de nuance que « les têtes qui vivent au milieu de tout cela [le décorum égyptien], reproduisent et rappellent le type grec et rien de plus (3) », celle de Thermutis en est la cause. Mais c’est qu’au cours de ses études romaines le peintre, cédant, comme la plupart des jeunes artistes étrangers découvrant Rome, au charme du peuple italien, n’a pas résisté à la tentation d’en capturer la beauté. (M.K.)


 

1. Alphonse Périn, Œuvres diverses de Victor Orsel (1795-1850), Paris, 1852-1877, 2 vol., I, p. 11-17.

2. Charles Lenormant, Les Artistes contemporains. Salon de 1831, Paris, 1833, p. 101, 124-125.

3. Gustave Planche, Salon de 1831, Paris, 1831, p. 187.

 



 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ill. 1. Victor Orsel, Moïse présenté à Pharaon par Thermuthis, 1826-1830. Huile sur toile, 328 x 434 cm.
Lyon, musée des Beaux-Arts.

 

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