Après des études à l’Académie des beaux-arts de Stockholm de 1889 à 1892, Pelle Swedlund se rend en France où il réside trois ans, entre Paris et la Bretagne. Au contact de Gauguin et des peintres de l’école de Pont-Aven, le Suédois s’éloigne des standards académiques et explore la voie du synthétisme. Si c’est également en France qu’il découvre le symbolisme, le mythe de Bruges-la-Morte qui se développe avec le roman de Georges Rodenbach (1892) le conduit dans cette ville, seconde étape de sa maturation artistique. Il y réside en 1898-1899 et y compose les toiles qui feront son succès à son retour dans son pays. À l’exposition de l’Association des artistes sué- dois à Stockholm, en 1899, le Nationalmuseum acquiert Sommarkväll (Soir d’été), et le musée de Goteborg Det öde huset, Brügge (La Maison déserte, Bruges), composition dont le succès est attesté par plusieurs répétitions postérieures. Jusqu’en 1912 le peintre réside principalement en Italie, tout en envoyant ses œuvres dans des expositions en Suède et à travers l’Europe – à la Biennale de Venise en 1901, à Munich en 1905, où il reçoit une médaille d’or, à Rome en 1911. À la fin de sa vie, Swedlund occupe les fonctions de conservateur de la Thiel Gallery, de 1932 à 1946.
En 1895, à la première Biennale de Venise, le public italien découvre l’art moderne suédois et les œuvres d’Anders Zorn, Carl Larsson, Robert Bergh, Bruno Liljefors, Karl Nordtsröm ou Niels Kreuge. Le genre du paysage séduit tout particulièrement car son approche est nouvelle. Le regard porté par ces artistes est à la fois franc et poétique, tout en saisissant l’immédiateté du moment et du lieu. Ils exposent régulièrement en Italie, et, dès 1909, Gustav Fjaestad voit s’ouvrir sa première exposition personnelle à Rome.
Loin de la vision méridionale que les Scandinaves ont pu donner de l’Italie au XIXe siècle, les peintures italiennes de Swedlund sont des paysages crépusculaires empreints d’un profond sentiment mélancolique. La lumière sourde de Romulus et Rémus, traitée par de grands aplats bleu-vert et gris, traduit une gravité que l’on prête rarement aux paysages d’Italie. La monumentale et symbolique Lupa capitolina, vue en contre-jour, est pourtant une référence univoque à la Cité éternelle. Si l’artiste a traité ce sujet dans une autre toile1, l’œuvre que nous présentons marque un aboutissement de la recherche: la composition, traitée avec une matière épaisse et dense qui confère une certaine pesanteur, presque organique, à l’œuvre, atteint une simplicité formelle. Plongée dans une atmos- phère de solitude et de silence, elle incarne une voie à mi-chemin du symbolisme et du synthétisme hérité de son séjour breton.
Marianne Paunet
1. Le Soleil de Rome, huile sur toile, 103,5 x 98,5 cm (Vente, Stockholm, Auktionsverk, 7 décembre 2011, lot 1997).