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(Tuna, 1866 – Stockholm, 1938)
Le Havre, vers 1895
Huile sur carton
24 x 32 cm.
Signé en bas à droite : Helmer Osslund
Inscription récente au revers du support : Le Havre
Provenance
– Collection particulière suédoise.
L’artiste suédois Helmer Osslund entame sa carrière comme peintre sur céramique dans une fabrique artisanale. Il fait preuve d’une habileté pour ce travail décoratif et ornemental, mais se lasse rapidement de son caractère répétitif et préfère se consacrer pleinement à la peinture. Osslund voyage pendant plusieurs années en Europe pour construire sa culture artistique et se confronter aux maîtres du passé (Écosse, Pays-Bas, Allemagne, Italie). À Paris, il reçoit les conseils de Paul Gauguin et du Danois Jens Ferdinand Willumsen : deux figures majeures qui lui enseignent le synthétisme du paysage et des associations chromatiques symbolistes. Dès 1898, Osslund rentre en Suède et s’installe dans la région du Norland, territoire reculé et sauvage qui n’était guère prisé des artistes. Lors de longues promenades qui lui permirent de prendre la mesure, par le corps, d’immenses étendues, il réalisait de nombreuses peintures sur le motif. Il travaille souvent avec des brosses ou des pinceaux épais qui laissent visibles le processus de création et l’application de la matière, sur des supports relativement pauvres, des papiers de récupération de petites dimensions faciles à transporter.
La plupart de ses oeuvres connues et exposées (principalement en Suède) sont des paysages, mais une exposition monographique présentée en 2009 à Stockholm a démontré qu’il excella également dans le genre du portrait (des portraits d’attitudes non posés). Il reçut par ailleurs plusieurs commandes privées dont quelques paysages de son ami et bienfaiteur le consul Emil Matton, pour qui il exécuta quatre grands tableaux sur le thème des saisons. Des oeuvres nourries par des observations topographiques précises, mais largement retravaillées en atelier. Les motifs ornementaux, simplifiés et épurés, sont directement tirés de son expérience de céramiste. Peintre encore méconnu hors de son pays, Helmer Osslund a fait l’objet d’une étude monographique importante menée par Nils- Göran Hökby, conservateur au Nationalmuseum de Stockholm, mais ses recherches demeurent inabouties à son décès en 2002. Son travail a essentiellement permis de documenter la biographie et le parcours du peintre. Toutefois il reste à analyser les apports et les liens de cet artiste avec les avant-gardes européennes, en particulier pour mieux situer le formalisme de ses oeuvres qui ne fut jamais vraiment étudié.
En marge des grands mouvements du début du siècle qui préparent l’expressionnisme (Die Brücke, Der Blaue Reiter…), Osslund démontre malgré tout une sensibilité pour les nouvelles formes de représentation et une capacité à enrichir d’une manière personnelle des idées en germe en Allemagne (Ernst Ludwig Kirchner) ou dans les pays nordiques (Edvard Münch). Il n’est pas non plus indifférent aux derniers développements de la peinture française.
Notre vue d’une partie du port du Havre est une oeuvre précoce dans la carrière d’Helmer Osslund : un très charmant et rare témoignage de son séjour français que l’on peut situer en 1894-1895 grâce à l’une de ses aquarelles représentant un pont sur la Marne à Chennevières, en région parisienne, datée de 1894. Influencé, dans les dernières années du XIXe siècle, par la touche impressionniste, Helmer Osslund effectue une sorte de pèlerinage sur les traces des précurseurs de ce courant inauguré plus de vingt ans auparavant au Havre par Claude Monet qui a peint dans le port normand l’iconique Impression, soleil levant (1873). Pissarro, Sisley, Monet, les ténors du plus célèbre mouvement d’avant-garde ont tous expérimenté, avec une touche divisionniste, les effets lumineux et chromatiques observés au Havre. Osslund ne cède pas à la tentation pointilliste en vogue à la toute fin du siècle et s’applique à composer un paysage hybride, entre espace marin et urbain, dans la veine impressionniste des débuts, que ce soit dans le traitement des mouvements de l’eau et de ses reflets, par les effets atmosphériques dans le ciel, ou le cadrage relativement moderne, resserré, qui concentre l’attention sur la vie moderne. (G.P.)
Shorten
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