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(Lyon, 1776 – Paris, 1842)
Le Duc de Bordeaux veillé par un ange, vers 1820
Plume et encre brune, lavis brun, sur traits de graphite
23,6 cm x 28 cm
Signé en bas à gauche : P. Révoil
Provenance
– Provient d’un album amicorum de Louis Aimé-Martin (Lyon, 1782 – Paris, 1847) dispersé en 2017.
Après une première formation lyonnaise chez un fabriquant de papier peint, Révoil s’est rendu à Paris vers 1795 pour entrer dans l’atelier de David. Rejoint par son condisciple et ami Fleury Richard, il devient avec ce dernier l’un des initiateurs de la peinture « troubadour », nouveau genre s’attachant à l’histoire nationale du Moyen-Âge et de la Renaissance, traité sur le mode anecdotique de la scène de genre avec le faire méticuleux des peintres hollandais.
L’iconographie de la naissance d’un héritier royal se rencontre sous tous les régimes du XIXe siècle. C’est un talisman contre la hantise de tout renversement de l’ordre dynastique, menace qui s’exécute régulièrement depuis la Révolution. Quoique l’arrivée de l’enfant providentiel soit un facteur de consolidation de la dynastie régnante, sa représentation ne dérive pas de la mythologie héroïque, mais est empruntée à une imagerie chrétienne porteuse d’espérance – il n’est pas Hercule étouffant les serpents dans son berceau, mais un poupon veillé par un ange. L’analogie du dessin de Révoil avec le groupe de Pradier invite à y voir la même iconographie, mais c’est un autre héritier que célèbre l’artiste légitimiste. Celui-ci ne prêta pas allégeance à Louis-Philippe et fut, de fait, considéré comme démissionnaire de son poste de professeur à l’École de dessin de Lyon après la révolution de 18301. L’enfant de son dessin est donc plus probablement l’héritier des Bourbons, Henri d’Artois, duc de Bordeaux, fils de la duchesse de Berry qui avait fait de Révoil son peintre en 1822. L’enfant naquit au palais des Tuileries le 29 septembre 1820.
Peintre de sujets moyenâgeux et collectionneur de « gothicités », Révoil se montre finalement moins gothique dans ce dessin que Pradier dans sa sculpture, en drapant son ange à la manière de Raphaël ou de son émule moderne, Ingres (le Vœux de Louis XIII), plutôt qu’à la mode du temps de Saint Louis. Le sujet est d’ailleurs assez inhabituel dans son oeuvre et dut être composé spécialement pour plaire à son destinataire, le littérateur Louis Aimé-Martin, disciple de Bernardin de Saint-Pierre devenu conservateur de la Bibliothèque Sainte-Geneviève. (M.P. et M.K.)
1. Marie-Claude Chaudonneret, La Peinture troubadour. Fleury Richard et Pierre Révoil, Paris, Arthena, 1980, p. 115.
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