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(Tournon, 1646 – id., 1710)
Sainte Famille, ou Le Couronnement de la Vierge
1670
Huile sur toile
87 x 113 cm
Signée et datée en bas à droite sur le banc : « P. Sevin F. anno Dei 1670. »
Historique
Paris, Hôtel Drouot, 17-20 décembre 1988, lot n°23 ; Belgique, collection du comte et de la comtesse Jean-Jacques de Flers.
Bibliographie
Inédit.
Pierre Paul Sevin (Tournon, 1646 - 1710) est reconnu comme un dessinateur fertile de compositions destinées à la gravure et aux décors d’architecture, de théâtre, de fêtes et de célébrations royales. Cette œuvre représentant saint Joseph, la Vierge et l’Enfant intitulée Le couronnement de la Vierge est à ce jour l’une des seules peintures connues de la main du maître et met en lumière de manière exceptionnelle ses qualités d’invention[1].
L’œuvre est commandée durant le séjour de l’artiste à Rome par le ministre d’état Hugues de Lionne, marquis de Berny, qui fut nommé par Louis XIV à la tête de son gouvernement dès 1661. La scène est ornée d’un cadre sculpté ovale en trompe-l’œil bordé de quatre écoinçons représentant les armes et les chiffres des familles d’Hostun de Claveyson et de Lionne. La composition renouvelle subtilement l’iconographie traditionnelle de la sainte famille en figurant le Christ enfant en train de déposer une couronne de fleurs sur la tête de sa mère de manière à préfigurer l’épisode du couronnement céleste succédant à l’Assomption.
L’artiste semble très marqué par l’influence des maîtres florentin du XVIe siècle. En atteste la similitude que la figure de saint Joseph présente avec celle peinte par Bronzino vers 1540 dans une composition célèbre représentant la Sainte Famille conservée dans les collections du duc de Toscane. Sevin transpose aussi la délinéation des mains, des ailes de l’ange et de la physionomie du Christ[2]. On reconnait à l’arrière-plan de la composition, dans la perspective du jardin inventé par Sevin, la statue de Diane chasseresse qui se situait dans la salle des antiques du Louvre de 1602 à 1661 puis dans l’appartement bas du roi aux Tuileries de 1661 à 1696. L’œuvre est gravée par Claude Mellan en 1669, Sevin qui n’avait pas encore eu l’occasion de se rendre à Paris, semble en avoir déjà connaissance et représente la statue dont il prend la liberté de réinventer le dos. Ce motif pourrait évoquer la familiarité du commanditaire avec les plus hauts dignitaires de la cour de France.
Artiste lettré, instruit par les Jésuites dans le collège réputé de Tournon (Ardèche), Sevin poursuit une carrière exceptionnelle. Protégé par le célèbre révèrent père Claude-François Ménestrier, il fréquente l’entourage de Claude Gellée dit Le Lorrain et du Bernin durant son séjour à Rome (1666-1671). Sevin entame son ascension à Paris de 1673 à 1689 protégé par le cardinal de Bouillon. A cette époque, il réalise les réductions des Noces de Cana et du Repas chez Levy à la gouache sur vélin d’après Paul Véronèse. Sevin exécute également des réductions d’œuvres de l’Albane[3]. Ces ouvrages sont exécutés la même année qu’un frontispice du Triomphe du Grand Condé et répertoriés dans la fameuse collection du descendant du prince de Condé, Louis-François de Bourbon-Conti (1717-1776)[4].
Par ses dimensions et la qualité de sa facture, sa palette vive privilégiant les rouges et les bleus, le dessin minutieux des figures ainsi qu’un traitement soigné des draperies, Le Couronnement de Vierge révèle l’étendue du répertoire et de la culture picturale du maître – moyens d’une remarquable distinction au cours des années 1670 et 1680.
Laetitia Pierre-Henri
[1] Nous remercions ici Damien Chantrenne spécialiste de l’œuvre de Pierre-Paul Sevin pour les informations transmises à l’occasion de la rédaction de cette notice et renvoyons le lecteur à ses travaux de recherche, plus particulièrement à sa thèse de doctorat intitulée : Pierre Paul Sevin, illustrateur et créateur de décors de fêtes et de cérémonies sous Louis XIV, (dir.) Jérôme de la Gorce, université Paris 4 Sorbonne, 2012.
[2] Détail de la figure de saint Joseph d’Agnolo di Cosimo, dit Bronzino, Sainte Famille, v. 1540, huile sur toile, H. 126,8 ; L. 101,5 cm, Kunsthistorisches Museum Wien, Gemäldegalerie.
[3] P. P. Sevin (attr.), Salmacis et Hermaphrodite et Apollon et Daphnée, gouache sur velin, H. 12 ; L. 22,5 cm, Vente Aguttes, 30 mars 2011, lot n° 305
[4] La galerie Descours avait présenté dans un précédent numéro de Varia un frontispice représentant Le Triomphe du grand Condé dessiné par Pierre-Paul Sevin en 1674, voir : Varia. Peintures et dessins de Paris Bordone à nos jours, n°6, 2015, p. 32, ill. Pierre-Paul Sevin, d’après Paul Véronèse, Les noces de Cana, 1674, aquarelle du velin, gouache, pierre noire, H. 35 ; L. 52,5 cm, signée et datée, vente Christie’s, Old masters & Bristish drawings, USA, 14/- 28 janvier 2022, lot n°40 ; Pierre Paul Sevin d’après Paul Véronèse, Le repas chez Levy, 1674, aquarelle et gouache sur velin, H. 34 ; L. 51 cm, signée et datée, Vente Sotheby’s New York, 30 janvier 1997, n°141.
Shorten
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