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(Berlin, 1793 - Mayence, 1877)
Autoportrait, 1809
Huile sur toile marouflée sur carton
16,5 x 11,3 cm (vue)
Historique
D’après une inscription en anglais qui figurait au revers du montage d’origine, l’oeuvre proviendrait de Joseph Anton Settegast (1813-1890), élève et gendre de Veit ; peut-être restée en possession de ses descendants jusqu’en 1928, date à laquelle ils se séparent de certaines oeuvres leur appartenant1.
Philadelphie, collection particulière jusqu’en 2014.
Moins connu qu’Overbeck ou Cornelius, Philipp Veit n’en est pas moins l’un des plus importants représentants de la confrérie nazaréenne à Rome, au début du XIXe siècle2. Ce fils de banquier juif évolue dans un milieu cultivé berlinois – il n’a pas connu son grand-père, le philosophe Moses Mendelssohn, mais vit en compagnie de Friedrich Schlegel, que sa mère a épousé en secondes noces. En 1809 il intègre, en compagnie de son frère Jonas, l’Académie des beaux-arts de Dresde, où il est l’élève de Friedrich Matthäi et de Caspar David Friedrich, jusqu’à ce qu’il considère, deux ans plus tard, ne plus rien avoir à attendre de cette scolarité. Sa conversion au catholicisme en 1811, à Vienne, où le couple Schlegel s’est installé, va considérablement influer sur sa carrière. La maison familiale est le foyer où la jeune compagnie de peintres que Philipp y réunit, composée des frères Olivier, de Schnorr von Carolsfeld, Scheffer von Leonardshoff, Joseph Sutter, contracte l’idéal d’un nouvel art patriotique et religieux au contact de Schlegel. L’action à laquelle son enthousiasme idéologique conduit le jeune homme ne tient cependant pas ses promesses : après avoir marché sur Paris avec l’armée autrichienne en 1814, il demande son congé pour ne plus s’occuper que de son art.
En août 1815 il rejoint son frère à Rome, lequel l’introduit dans la confrérie de Saint-Luc (Lukasbund), fondée par d’anciens élèves de l’Académie de Vienne unis par la volonté de retrouver, à travers l’archaïsme de modèles pré-raphaélesques, un art vrai, dépourvu de tout académisme et exprimant une foi inconditionnelle. Il retrouve également un soutien de poids en la personne de son oncle, Jacob Salomon Bartholdy, nommé consul général de Prusse en Italie. Ce dernier confie à Veit et à ses amis Overbeck, Cornelius et Von Schadow, le décor à fresque d’une salle de sa demeure, le palazzo Zuccari (renommé Casa Bartholdy lors de son acquisition par la Alte Nationalgalerie de Berlin en 1867 ; elle abrite aujourd’hui la Biblioteca Hertziana). Suivent d’autres fresques : Le Triomphe de la religion au musée du Vatican, et surtout celle du plafond de la salle de Dante au Casino Massimo, Le Paradis, exécutée entre 1822 et 1824 dans l’esprit de Fra Angelico. Appelé à diriger le Städel à Francfort, en 1830, il y crée un cours de peinture qui l’impose bientôt comme le chef de l’école locale. Veit finit sa carrière comme directeur de la galerie de Mayence, où il exécute sa commande la plus colossale, le décor à fresque de la cathédrale.
Inédit, l’autoportrait qu’une inscription ancienne en anglais datait de 1809 est une oeuvre précieuse pour la connaissance de l’oeuvre de Veit, dans la mesure où aucune peinture antérieure à 1812 n’était jusqu’à présent répertoriée. L’inscription n’étant plus conservée, la date doit être proposée avec prudence, cependant la comparaison avec l’autoportrait daté vers 1816 (ill. 1) établit indéniablement sa précocité. L’exercice d’autoreprésentation est modeste mais appliqué ; l’exécution tient plus du dessin que de la peinture, l’huile étant appliquée comme de l’aquarelle, en une couche légère. L’artiste jauge ses moyens dans le premier genre qu’il pratiquera et qu’il considérera comme « la base de toute la peinture à sujet historique3 ». (M.K.)
1. Communication écrite de Norbert Suhr.
2. Voir Norbert Suhr, Philipp Veit (1793-1877). Leben und Werk eines Nazareners, Weinheim, 1991.
3. Lettre à Simon Veit, 24 mars 1812, cité par J. M. Raich, Dorothea von Schlegel geb. Mendelssohn, Mainz, 1881, II, p. 68.
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